Réponse :
«
Vous venez vous-même de répondre à votre question en disant que les esprits ont
une seule langue qui est celle de la pensée ; cette langue est comprise de
tous, aussi bien des hommes que des esprits. L'Esprit errant, en s'adressant à
l'Esprit incarné du médium, ne lui parle ni français, ni anglais, mais la
langue universelle qui est celle de la pensée ; pour traduire ses idées dans un
langage articulé, transmissible, il puise ses mots dans le vocabulaire du
médium. »
Question :
S'il en est ainsi, l'esprit ne devrait
pouvoir s'exprimer que dans la langue du médium, tandis qu'on en voit écrire
dans des langues inconnues de ce dernier ; n'y a-t-il pas là une contradiction
?
Réponse :
« Remarquez d'abord que tous les médiums
ne sont pas également propres à ce genre d'exercice, et ensuite que les Esprits
ne s'y prêtent qu'accidentellement, quand ils jugent que cela peut être utile ;
mais, pour les communications usuelles et d'une certaine étendue, ils préfèrent
se servir d'une langue familière, parce qu'elle leur présente moins de
difficulté matérielle à vaincre. »
Question :
L'aptitude de certains médiums à écrire
dans une langue qui leur est étrangère ne viendrait-elle pas de ce que cette
langue leur aurait été familière dans une autre existence, et qu'ils en auraient
conservé l'intuition ?
Réponse :
« Cela peut certainement avoir lieu,
mais ce n'est pas une règle ; l'Esprit peut, avec quelques efforts, surmonter
momentanément la résistance matérielle qu'il rencontre ; c'est ce qui arrive
quand le médium écrit, dans sa propre langue, des mots qu'il ne connaît pas. »
Question :
Une
personne qui ne saurait pas écrire pourrait-elle écrire comme un médium ?
Réponse :
«
Oui ; mais on conçoit qu'il y a là encore une grande difficulté mécanique à
vaincre, la main n'ayant pas l'habitude du mouvement nécessaire pour former les
lettres. Il en est de même chez les médiums dessinateurs qui ne savent pas
dessiner. »
Question :
Un médium très peu intelligent
pourrait-il transmettre des communications d'un ordre élevé ?
Remarque.
Ceci est un fait constaté par
l'expérience ; nous avons plusieurs fois évoqué des idiots vivants qui ont
donné des preuves patentes de leurs identité, et répondaient d'une manière très
sensée et même supérieure. Cet état est une punition pour l'Esprit qui souffre
de la contrainte où il se trouve. Un médium idiot peut donc quelquefois offrir
à l'Esprit qui veut se manifester plus de ressources qu'on ne croit. (Voir
Revue Spirite, juillet 1860, article sur la Phrénologie et la Physiognomonie.)
Question :
D'où vient l'aptitude de certains
médiums à écrire en vers, malgré leur ignorance en fait de poésie ?
Réponse :
« La poésie est un langage ; ils peuvent
écrire en vers, comme ils peuvent écrire dans une langue qu'ils ne connaissent
pas ; et puis, ils peuvent avoir été poètes dans une autre existence, et, comme
on vous l'a dit, les connaissances acquises ne sont jamais perdues pour
l'Esprit qui doit arriver à la perfection en toutes choses. Alors ce qu'ils ont
su leur donne, sans qu'ils s'en doutent, une facilité qu'ils n'ont pas dans
l'état ordinaire. »
Question :
En est-il de même de ceux qui ont une
aptitude spéciale pour le dessin et la musique ?
Réponse :
« Oui ; le dessin et la musique sont
aussi des manières d'exprimer la pensée ; les Esprits se servent des
instruments qui leur offrent le plus de facilité. »
Question :
L'expression de la pensée par la poésie,
le dessin ou la musique dépend-elle uniquement de l'aptitude spéciale du médium
ou de celle de l'Esprit qui se communique ?
Réponse :
« Quelquefois du médium, quelquefois de
l'Esprit. Les Esprits supérieurs ont toutes les aptitudes ; les Esprits
inférieurs ont des connaissances bornées. »
Question :
Pourquoi l'homme qui a un talent
transcendant dans une existence ne l'a-t-il plus dans une existence suivante ?
Réponse :
« Il n'en est pas toujours ainsi, car
souvent il perfectionne dans une existence ce qu'il a commencé dans une
précédente ; mais il peut arriver qu'une faculté transcendante sommeille pendant
un certain temps pour en laisser une autre plus libre se développer ; c'est un
germe latent qui se retrouvera plus tard, et dont il reste toujours quelques
traces, ou tout au moins une vague intuition. »
Allan KARDEC - Le
livre des médiums